Adoption des véhicules électriques et pouvoir de suffisance : pourquoi une autonomie moindre est plus importante
- Alex Pickworth
- 3 févr.
- 3 min de lecture

Dans la course à l'adoption des véhicules électriques (VE), les constructeurs automobiles se livrent une bataille pour offrir la plus grande autonomie, les plus grosses batteries et le plus grand nombre de véhicules. Il s'agit d'une course aux armements qui, à bien des égards, passe à côté de ce dont nous avons réellement besoin. L'anxiété liée à l'autonomie est réelle, mais c'est aussi un problème que nous pouvons résoudre grâce aux sciences du comportement, et nous pouvons commencer par recadrer le débat sur l'autonomie elle-même.
La vérité est surprenante : Eurostat estime que la distance moyenne quotidienne parcourue en Europe se situe entre 50 et 70 km. Ce chiffre est largement en deçà des capacités des véhicules électriques à plus faible autonomie actuellement sur le marché. Et pourtant, les gens se sentent toujours anxieux. Pourquoi ? À cause de notre tendance psychologique à imaginer le pire : se retrouver sans électricité est un cauchemar imaginaire qui nous hante, même s'il est très éloigné de nos habitudes de conduite réelles.
C'est là que les gouvernements peuvent intervenir. Les constructeurs automobiles, bien entendu, cherchent à se démarquer de la concurrence en proposant des batteries plus puissantes, une autonomie plus importante et des fonctionnalités qui promettent de surpasser la concurrence. Mais en tant que société, nous n'avons pas besoin que chaque véhicule électrique ait une autonomie de 1 000 km. Ce dont nous avons besoin, c'est que les gens se sentent à l'aise et confiants dans le fait que leur véhicule électrique peut répondre à leurs besoins quotidiens.
Une campagne de publicité publique, financée par l’UE ou les gouvernements nationaux, pourrait faire des merveilles pour combler ce fossé psychologique. En utilisant un concept appelé « cadrage de suffisance », nous pouvons remodeler le débat : et si, au lieu de considérer les véhicules électriques à faible autonomie comme des défauts, nous commencions à les considérer comme un choix intelligent et efficace ? Après tout, pourquoi transporter un poids supplémentaire, payer pour une capacité de batterie supplémentaire et s’inquiéter du coût environnemental supplémentaire alors qu’en réalité, la plupart des gens n’en ont tout simplement pas besoin ? Choisir un véhicule électrique avec une autonomie suffisante est, comme j’aime l’appeler, « la rébellion intelligente contre les excès inutiles ».
Imaginez une campagne publicitaire qui met en avant les économies que vous ferez avec un véhicule électrique, et qui utilise ces économies pour présenter une image convaincante. En réalité, la plupart des véhicules électriques vous permettent d'économiser suffisamment d'argent pour que vous puissiez louer une voiture à essence pour ces rares trajets. En fait, grâce aux économies réalisées, vous pourriez conduire une voiture plus luxueuse en vacances que celle que vous pourriez vous permettre autrement. La logique de cette idée ne sera peut-être pas convaincante, mais l'image le sera certainement : la possibilité de conduire une voiture haut de gamme pour vos vacances, grâce aux économies réalisées avec votre véhicule électrique quotidien, est un avantage bien plus attrayant qu'une « autonomie suffisante » abstraite.
Le pouvoir des sciences comportementales réside dans leur capacité à ajuster nos cadres mentaux. L’anxiété liée à l’autonomie ne se limite pas aux chiffres, mais concerne nos attentes, la nécessité d’ajuster ce dont nous pensons avoir besoin par rapport à ce dont nous avons réellement besoin. Pour la grande majorité des gens, même les véhicules électriques à autonomie la plus courte sont plus que suffisants pour la vie quotidienne. L’objectif est d’aider les consommateurs à considérer cette autonomie non pas comme un compromis, mais comme une décision sûre et avisée qui leur donne une longueur d’avance.
Plus tôt nous convaincrons la majorité des consommateurs d’adopter le véhicule, plus tôt nous pourrons mettre de côté les mesures incitatives gouvernementales et laisser le marché prendre le relais. Mais pour y parvenir, nous devons changer de discours, remettre en question les préjugés et utiliser les bons outils, comme le cadre de suffisance et les coups de pouce intelligents qui répondent aux aspirations humaines. Les gouvernements ont la position unique de le faire, en accélérant l’adoption en renforçant la confiance et le confort plutôt qu’en alimentant les peurs. Il est temps d’intensifier nos efforts et de repenser ce que signifie réellement « assez » dans le monde des véhicules électriques.



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